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: Traité du grand Mecanium populaire :"En outre, édifié avec le concours d'un harmoniste éclairé, un prodigieux système de rouages inextricables, régentant les huit zones séparément et dans leur ensemble, s'opposait à la production de toute cacophonie sans exclure aucune combinaison rationnelle et analysable" (Raymond Roussel, Locus Solus). Je n'irai pas par 4 chemins, je ne couperai pas la poire en 2, je ne mettrai pas de gants, j'irai droit au but : "Pierre BASTIEN est l'authentique homme-machine du XX° siècle". Fils spirituel de Jesse Fuller (homme-orchestre inventeur du Footdella, basses sur cordes graves de piano actionnées par les orteils) et de Gaston Pawlowski (le soutien-ventre pour wagon, les clôtures musicales, les négatifs pour nègres...), ses premières étapes inventives sont peu connues : la guitare gonflable, le trombonium hydraulique, le nain de jardin qui chante Ramona, les touches de piano en lames de rasoir pour fakir mélomane etc. On connaît mieux sa légendaire partie auto-réduite de contrebasse sur Rock'n'roll Station avec Jac Berrocal et Vince Taylor, trinité cycliste, Pieds Nickelés de la New Thing, qui élevèrent le bégaiement aux sommets de cathédrales en saindoux dignes de Margot Winchester, la double Sainte-Agathe sans rustine. Avec le bicéphallique duo Nu Creative Method, il avoue ses passions extensibles pour les orchestres de trompes orthopédiques tibétaines. Avec les Effectifs de Profil, il considère enfin le quatuor à cordes comme le tonneau-rustique-bar-musical du catalogue des Trois-Suisses. Avec le Bel Canto Orquestra, il honore les précurseurs aux noms mystérieux : Wilbur de Paris, Honoré Dutrey, Bob Gillette, André Hilaire, Russel Procope... sans oublier King Oliver et ses Synfonic Syncopators et le Marcel's Jazzband des Folies Bergères, de la glorieuse époque montalbanaise où l'on disait pieusement " un jazz ". Avec Marc Dufourd, le Clovis Trouille de la six cordes ménagères, il grave une choucarde version du Vendeur de Cacahouètes (The Peanut Vendor ou El Manisero, c'est selon), cette " lamentable rumba ", dont la création incombe au Père Bartholomé de Las Casas qui remplaça les indiens des mines d'or antillaises par des nègres d'Afrique, selon J.-L. Borges (L'Histoire de l'Infamie). Pierre BASTIEN joue aussi de la scie musicale, du piano avec les pieds, du violon en position exotique, de quelques instruments à cordes de facture post-cubiste fabriqués par M. Jean Weinfeld, du Bauhaus (Fonics) ; les contrepèteries musicales, les palimpsestes brillants et les palindromes osés n'ont aucun secret pour cezigue (Un La Minimal, Nu). La pratique instrumentale de M. BASTIEN est proche de la fameuse apraxie idéatoire qui se révèle par l'exécution d'actes à chaînons multiples, élémentaires et successifs (par exemple, jouer comme allumer un cigare) = c'est-à-dire, arrêt d'un des stades intermédiaires (il garde l'allumette allumée sans l'approcher du cigare), éclipse d'une ou plusieurs étapes (il fume son cigare éteint), inversion des étapes (il frotte son cigare sur la boîte d'allumettes). L'apraxie idéatoire, forcément bilatérale, se complique souvent de persévération, c'est-à-dire de répétition de l'acte. Ce qui nous amène logiquement au Mecanium, le perpetuum mobile de Pierre BASTIEN, accessoire et maître de la machine. Le Mecanium est un orchestre polygambiste de Majorettes sonores et célibataires en squelettes articulés, en forme de violons interlopes, réunis en une Cinecitta à ampoules clignotantes (le mouvement perpétuel du beau néon y provoque l'allégresse !) actionnées par des turbines rétrécies de circuit Scalextric et autres moteurs de Teppaz de l'âge d'or microsillonesque. Le tout en structure de Meccano relié aux pieds et aux mains de ce Surmâle polyphoniste, et, comme la patate rhyzomatique, " ça fonctionne partout, tantôt sans arrêt, tantôt discontinu " (Deleuze-Guattari, L'Anti-Oedipe). C'est l'homme-canon, la femme coupée en morceaux, le petit chimiste, les gamelans javanais, le Portsmouth Sinfonia en version égoïste, la Tour Eiffel d'Emile Ratier, les porte-jarretelles à grelots, l'orchestre cruel d'Ubu-Roi, le branlyneur à ondes courtes, la machine à insultes de Louis Lesueur, le Symphonium, l'ariston, l'orchestrion, le clariton, le mélodéon, le piano-mélodico, le polyphon-concerto, le chordephon, La Mecque en haut de ce mec à nique, enfin. Pascal Comelade (violoniste balnéaire) [ BACK ] |
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